IEER | Énergie et Sécurité No. 33

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"La science pour les masses critiques" apparaîtra régulièrement dans Énergie et Sécurité. Elle fournira aux lecteurs des éléments de référence technique pour les questions de politique discutées dans chaque numéro, ainsi que l'occasion de mesurer leurs connaissances sur ces points techniques.

Plutonium et eau potable


Chronologie : normes pour le plutonium dans l’eau potable aux États-Unis

1959 — Publication du manuel NBS 69 et de la CIPR 2, énonçant les principes scientifiques permettant le calcul des concentrations maximales autorisées pour les radionucléides présents dans l’air et l’eau. Le manuel NBS 69 fixe les concentrations maximales moyennes admissibles pour les radionucléides présents dans l’air et l’eau, calculées sur la base d’une dose de 5 rems au corps entier et une dose de 15 rems à l’organe critique, avec l’utilisation de méthodes quelque peu différentes pour les radionucléides ostéotropes. Le manuel NBS 69 définit le « squelette hors moelle » comme l’organe critique pour les transuraniens émetteurs alpha et à vie longue.

1974 — La Loi sur l’eau potable (Safe Drinking Water Act) est adoptée par le Congrès « pour protéger la santé publique en appliquant une réglementation à l’approvisionnement en eau potable de la nation », autorisant l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA) à établir une réglementation sur les polluants dans les réseaux publics d’eau potable. (Voir ci-dessous.)

1975–1976 — Les réglementations nationales primaires sur l’eau potable (National Primary Drinking Water Regulations) sont proposées pour la première fois par l’EPA en mars 1975. Des règles sur les radionucléides sont proposées en août 1975. Une réglementation sur les polluants autres que les radionucléides est promulguée en décembre 1975. La réglementation sur les radionucléides est promulguée en juillet 1976. Les valeurs limites de contamination et les limites de dose pour les radionucléides ont été codifiées à l’origine dans les codes 40 CFR 141.15 et 40 CFR 141.16, renumérotés et réunis depuis, sans modification, dans le code 40 CFR 141.66. Les limites de détection et les méthodes analytiques pour les radionucléides ont été énoncées dans le code 40 CFR 141.25. (CFR signifie Code of Federal Regulations – Code de réglementation fédérale.)

1988 — La Recommandation fédérale 11 (Federal Guidance Report 11 – FGR 11) est publiée par l’EPA et sert de base à beaucoup des méthodes d’estimation de dose actuellement utilisées par l’EPA. Comparée au NBS 69, la FGR 11 intègre de nouvelles avancées dans la compréhension scientifique des doses d’irradiation et des dommages occasionnés par l’incorporation de radionucléides, à savoir les publications CIPR 26, 30 et 48. La FGR 11 définit la surface osseuse comme l’organe critique pour les transuraniens émetteurs alpha et à vie longue.

1999 —La Recommandation fédérale 13 (FGR 13) est publiée par l’EPA. La FGR 13 est la recommandation la plus récente de l’EPA mais elle n’est pas encore en vigueur pour les calculs réglementaires des doses reçues à partir de l’air et de l’eau. Elle est basée sur les facteurs de conversion de dose publiés dans la CIPR 72. Les facteurs de conversion de dose (c’est-à-dire la dose par unité de radioactivité incorporée) pour les transuraniens émetteurs alpha et à vie longue de la FGR 13 sont généralement légèrement inférieurs à ceux de la FGR 11.

Terminologie

Radionucléides transuraniens émetteurs alpha et à vie longue : Les radionucléides « transuraniens » sont des isotopes radioactifs dont les numéros atomiques sont supérieurs à celui de l’uranium (92), et sont donc « trans » ou « au-delà » de l’uranium. L’expression « à vie longue » se rapporte à la demi-vie du radionucléide, c’est-à-dire à la durée pendant laquelle un radionucléide reste dangereux pour la santé humaine. Les radionucléides « émetteurs alpha » émettent des particules alpha (qui sont des particules chargées positivement composées de deux neutrons et de deux protons) lorsqu’ils subissent une décroissance radioactive.

Dose engagée : la quantité d’énergie issue d’une radiation ionisante qui est déposée dans un organe au cours de la totalité de la durée pendant laquelle un radionucléide est présent dans cet organe. La dose engagée est différente de la dose annuelle en ce sens que la dose annuelle est la quantité d’énergie déposée dans l’organe en une seule année. Si un radionucléide est éliminé rapidement du corps, en d’autres termes en quelques jours ou semaines, la dose annuelle et la dose engagée sont alors généralement les mêmes. Par contre si le radionucléide est éliminé lentement de l’organe cible, sur des années ou mêmes des décennies (dans le cas des transuraniens émetteurs alpha à vie longue il s’agit de décennies), la dose à l’organe consécutive à une incorporation à une année donnée est transmise sur une période de plusieurs décennies après cet événement.

Organe critique : l’organe ou le tissu biologique qui présente le plus grand risque pour la santé d’un individu en cas d’exposition à une irradiation.

Alpha brut : mesure de la radioactivité totale causée par les émissions de particules alpha, sans tenir compte des différents radionucléides source. Aussi appelée activité alpha brute.

Valeur limite (VL) : La valeur limite (Maximum Contaminant Level – MCL) est le niveau de concentration d’un polluant au-delà duquel un réseau d’eau public serait en infraction avec la réglementation de l’Agence américaine de protection de l’environnement sur l’eau potable. La VL est généralement calculés sous forme d’un niveau moyen annuel.

Valeur limite recherchée : La Valeur limite recherchée (Maximum Contaminant Level Goal) est un niveau non contraignant au-dessus duquel des effets sanitaires négatifs sont possibles. Pour tous les radionucléides, la valeur limite recherchée est de zéro, dans la mesure ou toute exposition à des rayonnements ionisants conduit à une aggravation du risque de cancer.

 

Loi sur l’eau potable (Safe Drinking Water Act)

Le Congrès a adopté la Loi sur l’eau potable (Safe Drinking Water Act – SDWA) en 1974 pour « protéger la santé publique en appliquant une réglementation à l’alimentation en eau potable de la nation. » La SDWA a été amendée en 1986 et 1996 et elle autorise l’EPA à fixer des normes nationales sur l’eau potable basées sur la santé, pour une protection vis-à-vis des polluants naturels ou artificiels dans l’eau potable. La primauté de l’objectif sanitaire (plutôt que les limites numériques) apparaît clairement dans la description de la SDWA par l’EPA :

L’EPA fixe des normes nationales pour l’eau du robinet, qui permettent de garantir une qualité constante de l’approvisionnement en eau de la nation. L’EPA s’intéresse en priorité aux polluants pour créer éventuellement une réglementation basée sur le risque et la fréquence de leur présence dans l’approvisionnement en eau potable. (Pour soutenir cette action, certains réseaux d’eau potable surveillent la présence de polluants pour lesquels il n’existe actuellement aucune norme nationale, et recueillent des informations sur la fréquence de leur présence.) L’EPA fixe un objectif sanitaire basé sur le risque (en tenant compte des risques aux personnes les plus fragiles, c’est-à-dire les nourrissons, les enfants, les femmes enceintes, les personnes âgées et les immuno-déficients). L’EPA fixe ensuite une limite légale pour le polluant dans l’eau potable ou pour la mise en œuvre obligatoire d’une technique de traitement. (Safe Drinking Water Act 30th Anniversary: Understanding the Safe Drinking Water Act, dépliant EPA sur http://www.epa.gov/safewater/sdwa/30th/factsheets/understand.html)

 

Limites pour le niveau maximal de radioactivité et de certains radionucléides dans l'eau potable aux États-Unis

Radionucléide Limite pour l’eau potable Commentaires
Émetteurs bêta ou gamma artificiels 4 mrem/an à l’organe critique Inclut des produits de fission comme le césium 137, l’iode 129 et le technétium 99. Exclut le strontium 90 et le tritium. Les valeurs limites sont calculées à partir de la limite de dose de 4 mrem/an. La présence de plus d’un radionucléide réduit la valeur limite pour chacun d’entre eux, de façon à ce que la dose totale n’excède pas 4 mrem/an à l’organe critique.
Alpha brut 15 pCi/l Exclut le radon et l’uranium, inclut le radium 226 et les transuraniens émetteurs alpha à vie longue (notamment le plutonium 239). La présence de plus d’un radionucléide réduit la valeur limite pour chacun d’entre eux de façon à ce que le total n’excède pas 15 picocuries par litre.
Radium 5 pCi/l Inclut le radium 226 et le radium 228. Ce dernier est un émetteur bêta.
Uranium 30 µg/l Promulgué dans le contexte de la révision de l’année 2000. Soumis à la réglementation en tant que métal toxique, et non comme radionucléide. La valeur limite pour ce qui est de la radioactivité varie en fonction de l’enrichissement : 20 picocuries par litre pour l’uranium naturel, environ 12 picocuries par litre pour l’uranium appauvri, et plus de 20 picocuries par litre pour l’uranium enrichi.
Strontium-90   8 pCi/l  
Tritium 20 000 pCi/l  

mrem/an = millirem par an           VL = Valeur limite           pCi/l = picocuries par litre          µg/l = microgrammes par litre


Voir aussi :



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(La version anglaise de ce numéro, Science for Democratic Action v. 13, no. 3, a été publiée en septembre 2005.)

Mise en place décembre 2005